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Sylvain GirO - Les affranchies

Les affranchies

Comme Vian ou Polnareff avant lui, Sylvain GirO explore la voie des chansons « épistolaires ». Dans son album Les Affranchies sorti en mars 2018, il chante des lettres intimes et poétiques, engagées et brûlantes, parfois drôles et absurdes. Et tisse un lien subtil entre toutes ces missives, pour nous offrir un album ultra cohérent et mieux nous dévoiler en filigrane son écho de la France d’aujourd’hui. Celle des migrants pourchassés par la police, celle des femmes ouvrières qui élèvent seules leur enfant, celle de la mémoire algérienne… La lettre pour mieux se jouer de l’absence. La lettre pour rendre leur dignité à ceux qui en sont privés. La lettre en forme de résistance à l’urgence et à l’oubli. Après Le batteur de grève puis Le lac d’Eugénie, Sylvain GirO creuse avec Les Affranchies une veine à la fois plus sociale sur le fond, plus directe sur la forme d’écriture. Il nous offre un album à la fois politique et poétique. Avec ses compères Erwan Martinerie (violoncelle électro-acoustique, machines, arrangements) et Julien Padovani (orgue Hammond, Fender Rhodes, Moog), s’accompagnant lui-même du violon et de la shruti-box, il propose un album aux consonances électro, post-trad et rock, agrémenté de morceaux radicalement dépouillés et acoustiques. Un disque terriblement actuel.

  • Je t’écris de la France 5’26
  • Le tigre de Tasmanie 4’12
  • Takomodé 3’27
  • À ma plume 2’04
  • Madame en col bleu 5’09
  • Le front de l’éclusier 4’37
  • Ton intime alizé 3’
  • En attendant venez me chercher 3’23
  • L’écho de nos ombres 4’28
  • Je ne t’écris pas 2’48
  • Pour qui celle-là ? 3’57

Echos

Ethnotempos – Sylvie Hamon – Juillet 2018

Attention, chef d’œuvre !

Attention, chef d’œuvre ! Avis aux amateurs de chanson francophone, d’originalité, de musiques contemporaine et électronique, de poésie et d’émotions : Sylvain GirO est de retour par la grande poste avec son nouveau CD, Les Affranchies, qui frappe déjà au premier abord par sa pochette sombre au décor urbain froid et nocturne. Les mots “Sylvain GirO les affranchies”, de la couleur blanche du papier à lettres, se détachent et attirent le regard.

Cet album est composé de onze chansons épistolaires dont le chanteur a signé tous les textes et dix des compositions. On se souvient du Déserteur de Boris VIAN, de la Lettre à France de Michel POLNAREFF, de la Letter to Hermione de David BOWIE ou encore de PS I love You des BEATLES, ces missives similaires dans leur forme à des chansons. Avec ses Affranchies, Sylvain GirO va bien plus loin dans le concept en écrivant et en chantant de vraies lettres sans les habituels couplets-refrains et rimes, parfois habilement maladroites, sur des contextes politiques et sociaux d’actualité ou plus personnels comme l’enfance, l’amitié ou la famille.

C’est d’une manière juste et sensible qu’il nous expose sa vision de la France d’aujourd’hui en mettant en scène des gens ordinaires (comme dans les chansons traditionnelles dont il est spécialiste) qui racontent leur quotidien à un proche, tout en nous plongeant avec force et émotion dans chaque situation. Original certes mais pas complètement timbré, il conjugue à merveille les mots avec la musique, donnant à chaque lettre l’allure d’un court métrage mis en musique. La puissance des histoires est sublimée par les compositions et arrangements et par la présence des deux musiciens qui l’accompagnent, Erwan MARTINERIE au violoncelle et aux machines (co-arrangeur avec Sylvain GirO de la plupart des titres), et Julien PADOVANI aux claviers Moog, Fender Rhodes et orgue Hammond.

D’emblée le premier morceau, Je t’écris de la France, pose un premier décor dramatique. Cette lettre désespérée d’un réfugié à sa femme disparue en mer est servie par une musique d’abord minimaliste où les machines distillent des sensations étranges et inquiétantes tandis le violoncelle évoque la tristesse, voire la violence dans une ambiance lente et étourdissante. Ensuite vient une lettre écrite par une mère célibataire au père de son enfant dans laquelle elle décrit son quotidien (Le Tigre de Tasmanie) qui évoque parfaitement le malaise des familles séparées par son climat tendu et obsédant rendu par les instruments et par l’écho répétitif du chant sur les trente dernières secondes.

Un changement d’atmosphère s’opère grâce à la légèreté des cordes et l’agilité moqueuse de la plume et du chant dans Takomodé, message pourtant très sérieux adressé à la France dans laquelle Sylvain GirO réveille les consciences face au pouvoir politique qui grignotte peu à peu notre liberté, avec les claviers et machines qui n’interviennent que sur quelques mots et les phrases finales pour mieux les mettre en valeur. A ma plume est un interlude romantique sobrement accompagné au violoncelle et précède un morceau au texte désespéré, intitulé Madame en col bleu, qui reproche au président sa politique avec, en illustration, une intense et fantastique composition contemporaine d’Erwan HAMON, tour à tour étrange, grinçante, dansante, menaçante et apocalyptique, au final effrayant.

Pour illustrer Le Front de l’éclusier, une émouvante lettre d’une étudiante noyée à son frère évoquant la manifestation parisienne de 1961 contre la guerre d’Algérie qui a été réprimée par un massacre, Sylvain GirO pince les cordes de son violon pour imiter un oud en s’inspirant de la musique traditionnelle arabe. Si le violoncelle et le Fender Rhodes qui rejoignent le violon émeuvent, la musique illumine le morceau comme un soleil pour livrer un bel hommage aux révoltes toujours réprimées par le sang. Plus intimiste et pourtant tout aussi puissant, le texte poétique de Ton intime alizé évoque la force émotionnelle d’une lettre, pour laquelle le chanteur s’accompagne du bourdon de sa shruti box auquel vient se joindre sobrement le violoncelle.

Lettre maladroite et touchante d’un enfant en colonie de vacances à ses parents, En attendant venez me chercher est servie par une ambiance techno avec des samples de cour de récré, qui traduit des sensations tour à tour enthousiastes, inquiètes puis apaisées par des silences. Puis, seul au chant et au violon pour une lettre destinée à un ami, Sylvain GirO nous enchante avec le lumineux L’écho de nos ombres, interprété comme une comptine. Le contraste est saisissant avec Je ne t’écris pas, étrange “non-lettre” à une inconnue avec sa shruti box, ses machines au son industriel et ses claviers cristallins hypnotiques. Le chant de Sylvain se transforme en slam puis en vocalises jazzy sur le morceau final, Pour qui celle-là ?, un superbe hommage à ses parents, soutenu par les machines et le violoncelle d’Erwan MARTINERIE.

Contre la noirceur d’un monde déshumanisé et contaminé au langage sms sur écran, qui tend à neutraliser les sentiments, la pensée et la contestation, Sylvain GirO reprend la plume et le papier pour délivrer un message humaniste et politique. La finesse et la puissance de l’écriture et des compositions résolument modernes de ces Affranchies vont droit au cœur et donnent envie de rendre le monde meilleur pour tous. Puissent ceux qui nous gouvernent l’écouter et s’en émouvoir.

Jacoti – Magazine Hexagone – juillet 2018

Poignant

Avec les affranchies, Sylvain GirO livre des épîtres fortes qui dépeignent avec amertume l’état du monde, en particulier en France, grâce a des images poétiques impressionnantes. Ces lettres fictives émeuvent d’autant plus qu’elles sont autant de bouteilles à la mer envoyées sans espoir d’aucun retour ni même celui d’être lues, malgré l’attente obsédante d’un « écris-moi s’il te plaît » désespéré. Un « fantôme de rue » narre ainsi sa vie d’immigré sans-logis, victime de violences policières et du racisme ; il dévoile une déchirure profonde née de la séparation et de la douleur d’avoir perdu l’être aimé durant la traversée en mer.Retour ligne automatique
Une autre noyade est abordée de manière effarante par une jeune victime anonyme et oubliée du massacre du 17 octobre 1961 à Paris qui raconte : « à la première écluse j’ai vu le front de l’éclusier ». Poignant. D’autres belles allégorie telles que L’écho de nos ombres, ton intime alizé, ainsi que des tournures plaisantes ou absurdes exacerbent les sentiments ou les idées. Des références manifestes d’illustres prédécesseurs – Vian, Zola ou Polnareff – viennent soutenir le genre. Côté accompagnement, les influences traditionnelle bretonnes ou électro animent le récit tandis que le violoncelle d’Erwan Martinerie souligne le dialogue intérieur de l’auteur de ses lettres, pour les rendre plus vivantes encore.

Annie Claire – Francofans – Juin 2018

De sensibilité, de sens, de poésie…
« Il peut s’agir de vie privée, de manifeste engagé, de revendication… Ces chansons épistolaires sont toutes évocatrices de sensibilité, de sens, de poésie. La teinture musicale de Sylvain GirO reste perceptible. Mais le mode d’expression principale étant la parole, liée au violoncelle, l’atmosphère est autre. L’écriture est profonde, adaptée à chaque circonstance, les lettres s’enchaînent agréablement. Erwan Martinerie accompagne, suggère, ponctue les mots. Sylvain GirO ne déçoit pas. »

Le cri de l’ormeau – Avril 2018

Le funambule GirO
Au départ, on pense à Dominique A sur Je t’écris de la France. Les arrangements, le sens du verbe. Dès le second morceau, on compare avec les expérimentations de Noir Dés’, Fontaine, Bashung. Et puis après on se dit non, il y a aussi des influences orientales. Donc on attend le quatrième morceau. Et là il y a des cordes. Bon. On songe du coup à d’autres artistes. Et le truc avec Sylvain GirO, c’est que du premier au dernier morceau, on est tentés de catégoriser sans vraiment trouver la bonne case. Alors on finit par lâcher les comparaisons, et on écoute vraiment. Madame en col bleu, et surtout l’arabisant Le Front de l’éclusier revenant sur le drame du 17 octobre 1961. Profondément, une véritable envie de jouer avec les mots, mais, rare pour le souligner, une capacité à se faire léger, grave, moderne, sentencieux, étrange, et au final inclassable dans sa façon de tout réunir. Le funambule GirO passe de cordes en cordes sans perdre l’équilibre, sans s’épuiser. Comme L’écho de nos ombres. Comme Pour qui celle-là ? Combien d’albums aujourd’hui nous surprennent après trois-quatre morceaux ? Les Affranchies est un vaste laboratoire expérimental où interagissent parlé et phrasé, grandiloquence et simplicité jusqu’à l’os. Et au final, au bout de plusieurs écoutes, l’impression de tenir là une vraie signature, intime, « sociale et sensible ».

Pierre Morvan – Le peuple breton – Avril 2018

« De beaux textes poétiques et souvent engagés, parfois enragés, une voix chaleureuse entre émotion et colère, et un écrin musical sobre et percutant. Des mots juste pour dépeindre un pays, une société, qui ne le sont pas toujours, pas vraiment… ».

Michel Kemper – Nos enchanteurs – Avril 2018

Sylvain GirO, homme de lettres
Les affranchies. Affranchir au sens de s’acquitter de la taxe postale, au sens de lettre oblitérée. Mais affranchir a d’autres sens et tous, peu ou prou, s’accordent dans la démarche épistolaire de Sylvain GirO. On s’affranchit aussi d’une lettre : « Je suis la lettre, je suis l’encre / Je suis le bois de ton papier / L’enveloppe de ton sang d’encre / Je suis ton oiseau messager ».
La lettre à Élise, Les lettres, Lettre à France, Le déserteur, De la main gauche, Tu m’écris…, le genre épistolaire n’est pas étranger à la chanson, loin s’en faut. Là, Sylvain Giro a écrit des lettres pour tout un spectacle, tout un album. « Lettres intimes et poétiques, engagées et brûlantes, parfois drôles et absurdes. Et tisse un lien social entre toutes ces missives, pour mieux nous dévoiler en filigrane son écho de la France d’aujourd’hui ». « Je t’écris de la France / Où l’on ne vit qu’à pas lents / Où l’on meurt en rue sombre / Où l’on erre… » Ces correspondances ont la valeur d’autant de coupures de presse : reportages intimes, tranches de vies, d’actualité aussi. Ainsi ce jour du 17 octobre 1961 où la police du préfet Papon exécute des dizaines d’Algériens, à Paris : « A la première écluse, j’ai vu le front de l’éclusier / A la deuxième écluse, mes longs cheveux se sont défaits / A la troisième écluse, dans la Seine je me suis noyée ». C’est un réfugié qui jette à la mer une lettre en bouteille à sa compagne noyée, ce sont des femmes ouvrières qui élèvent seules leur enfant. C’est un simple citoyen qui, à la manière de Vian, interpelle notre président : « Je t’accuse d’être sourd / Face à notre souffrance / De jouer l’indifférence / D’avoir honte de nous / De vouloir du pays / Une image de cols blancs / De vainqueurs, de belles dents / De gens qui fassent envie / Et d’avoir en projet / Que nous soyons absents / Des journaux, des écrans / Invisibles rejets ». Là, c’est réchauffement climatique, pluies acides, disparition des espèces…
Par quelques lettres éparses, GirO fait cinglant réquisitoire, rare à ce point dans la chanson.­­ Sachez qu’en préambule de chaque nouvelle scène, il lance un appel aux spectateurs de nouvelles missives, dont il chante certaines. Lettres après lettres, c’est implacable cahier de doléances d’un monde qui saigne et souffre : le nôtre.
Ici, à l’unisson des lettres et de leurs calligraphies, les instruments font élégante écriture ou inquiétante dramaturgie. Violoncelle et machines rivalisent de concert. Les sons sont ponctuations, autre typographie où les points sont des poings, où l’angoisse se note tant sur les noires que sur les blanches. Vous ai-je dit que ce disque-là est important ?

Gérard Classe – Le Télégramme – Mars 2018

Écorchures aux ronces des chemins chaotiques
Si ce n’était la voix de l’interprète qui nous capte d’entrée, nous mettrions en exergue son écriture inspirée liant aussi fortement les thèmes abordés. Les onze titres du troisième album de Sylvain GirO, avancés façon missive, sont autant d’écorchures aux ronces des chemins chaotiques. « Je t’écris de la France où l’on ne vit qu’à pas lents, m’entends-tu de là-bas ? » hurle ce réfugié à sa femme engloutie par la mer. Nullement étouffé par cette énorme premier morceau, la suite n’est affaiblie en rien. L’auditeur éprouve au contraire l’édifiante envie de décacheter chaque lettre suivante. Il s’attardera forcément sur Madame en col bleu (« Monsieur le président je vous fais une lettre… ») puis se souviendra toute émotion pleine, du massacre des Algériens de Paris par le préfet Papon, le 17 octobre 1961 (Le front de l’éclusier). Cette album, aux couleurs musicales variées, incite à voir le spectacle dont il est extrait, que Sylvain GirO colporte dans le grand ouest est à Paris.

Le Trégor – Mars 2018

D’une grande sincérité

Voilà l’un des chanteurs bretons les plus intéressants. Longtemps chanteur de Katé-Mé, groupe qui a revisité le répertoire de haute Bretagne brillamment. C’est à une correspondance qu’il nous convie cette fois. Toujours dans l’espace de la voix et de la chanson, mais ce sont des courriers créés pour un spectacle qu’il interprète. Des textes écrits par lui-même, puissants, accompagnés soit par un violoncelle soit par des machines. Un ensemble brillant où l’on retrouve des accents des Cathédrales de l’industrie de Malicorne. Mais Sylvain GirO va au-delà, imposant un ton, un univers, où l’on croise le racisme, l’écologie, la justice. Des cris du cœur avec la douceur d’une voix, comme pour mieux porter une parole d’une grande sincérité.

Eric Tandy – La vie – Mars 2018

Un artiste comme il en existe peu aujourd’hui
Une vraie originalité, un ton et un artiste comme il en existe peu aujourd’hui. Sylvain GirO a choisi des accompagnements plutôt dénudées pour mettre en valeur son réalisme poétique et des textes puissants qui prennent le pouls de notre époque, parfois dure. Écrites sous forme de lettres, parfois déclamées de manière théâtrale, ses chansons parlent d’écologie, de racisme ou d’injustice. Intimiste ou engagé, avant-gardiste ou héritier d’une chanson française à texte plus traditionnelle, le chanteur fait passer son message avec beaucoup de force et de talent dans le choix des mots.

Michel Troadec – Dimanche Ouest-France – 11 mars 2018

Pour son troisième album, Sylvain GirO ne nous propose pas la forme traditionnelle du couplet refrain, mais des lettres chantées. Avec les mots bien au centre, pour toucher direct, pour s’inventer ses propres images. Le Nantais – ex-Katé-Mé – prévient d’emblée, il s’agit de chansons sociales et sensibles, pour ne pas dire sombres voire désespérées. On s’y agrippe car elles ont une résonance toute aussi actuel qu’universelle : la détresse de migrants, la terre qui meurt, le pays trompé, le massacre oublié, le manque, l’oubli. Textes forts, brillamment mis en musique dans un mélange à la fois étrange et prenant de violon, violoncelle électro acoustique, machines et shruti-box. Allez bien jusqu’à la dernière correspondance pour le supplément d’humanité : « pour être là quand tout se brise / Pour la main toujours tendu / Pour la table toujours dressée / Pour l’hospitalité… »